Projet 2022-IMPV-308966 / Octroi FRQS
Personnes aînées en attente de prise en charge par le programme-services SAPA : Évaluation de l‘intervention d’un nouveau partenaire – La Croix-Rouge québécoise.
Chercheur principal :
Dr Olivier Beauchet, Université de Montréal
PROJET
Problématique – La pandémie due à la maladie à coronavirus (COVID-19) a (1) fragilisé l’état de santé des Personnes Aînées (PA, >70 ans) vivant à domicile et a (2) augmenté le nombre de PA ayant besoin de services et soins de support. Avant la pandémie, on estimait que plus de 120 000 PA vivant à domicile, fragiles et ayant besoin de services et soins de support n’en recevaient pas. Aujourd’hui, ce chiffre est beaucoup plus grand. En parallèle, les programme-services de Soutien à l’Autonomie des Personnes Âgées (SAPA) qui fournissent des services et soins de support du domicile doivent faire face à des difficultés, telles qu’un manque de personnels, qui retardent la prise la prise en charge des PA fragilisées. Cette combinaison de facteurs a accentué les délais pour obtenir des services ou soins de support du domicile des PA inscrites sur les listes d’attente des guichets d’accès SAPA. À titre d’exemple, au CIUSSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal (CCSMTL), la liste d’attente du guichet d’accès des clientèles orphelines (GACO) sans médecin de famille est passée de 1300 à 1715 PA en quelque mois durant la pandémie, soit une augmentation de 32%. Ce bris de services et soins de support du domicile repose également sur la vulnérabilité de son continuum décrite avant la pandémie. L’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS) faisait le constat dès 2019 (1) de l’existence d’un délai de traitement des demandes au niveau du SAPA et que (2) ce délai était un obstacle à une prise en charge adaptée2. L’INESSS soulignait alors la nécessité de porter une attention toute particulière aux PA présentes sur les listes d’attente de prise en charge des guichets d’accès SAPA. Sur le plan individuel, la rupture du continuum des services et soins de support du domicile peut aboutir à la détérioration de la santé, l’autonomie et la qualité de vie des PA. À l’échelle collective, elle peut engendrer des coûts financiers de Soins et Services Sociaux (SSS) élevés. Il est donc crucial de mettre en place des solutions permettant à la fois (1) de rétablir la continuité de l’accès aux services et soins de support du domicile des PA qui sont sur les listes d’attente des guichets d’accès SAPA, et ainsi (2) de lutter contre la fragilisation de la santé et la progression de la perte d’autonomie de ces PA, afin d’améliorer leur qualité de vie et réduire les coûts financiers de SSS qui y sont liés.
L’INESSS a conclu en période de pandémie et en phase de rétablissement à la nécessité de: (1) faire un repérage des personnes les plus à risque telles que les PA, (2) coordonner les acteurs pour orchestrer leurs efforts, et (3) favoriser les services dits « télépratiques » afin de maintenir le continuum des services et soins. Évaluer, intervenir, coordonner et obtenir l’approbation des PA et des acteurs communautaires sont également 4 composantes identifiées pour assurer le continuum des services et soins de support du domicile. C’est sur ce constat d’actions combinées que nous avons conçu et mis à la disposition des acteurs du milieu communautaire, dès avril 2020, un outil clinique d’Évaluation et d’orientation SOcio-GÉRiatrique nommé « ESOGER ». Cet outil se présente sous la forme d’un questionnaire simple, accessible sur une plateforme numérique sécurisée. Il permet d’évaluer et d’intervenir rapidement et à distance au cours d’un appel téléphonique réalisé par un intervenant d’un organisme communautaire, avec la PA et/ou sa personne proche aidante (PPA) en: (1) déterminant si les besoins essentiels sanitaires et sociaux sont satisfaits ou non, (2) proposant des recommandations d’interventions assurées par des intervenants communautaires, (3) orientant les PA et en faisant le lien avec les organismes communautaires dont elles ont le plus besoin. Les travaux de recherche menés jusqu’à présent sur ESOGER ont montré que c’est un de rares outils cliniques: (1) de premier contact en télésanté, (2) global et multidomaines, (3) équitable – C’est-à-dire évitant la fracture numérique (la PA est évaluée par téléphone mais l’intervenant saisit l’information sur une plateforme numérique) – (4) évitant l’aggravation de la fragilité et (5) adaptée aux attentes et besoins des PA et des organismes communautaires. À ce jour, plus de 10,000 PA vivant à domicile ont pu bénéficier d’ESOGER. L’intérêt et l’utilité d’ESOGER ont été soulignés par le MSSS qui recommande son utilisation au sein des programmes-services SAPA du Québec depuis octobre 2020.
ESOGER est un outil clinique qui pourrait être utilisé pour débuter la prise en charge des PA qui sont sur les listes d’attentes des guichets d’accès SAPA tel que le GACO du CCSMTL. Mais pour cela, il est nécessaire de faire intervenir un nouvel acteur pour ne pas surcharger le SAPA et qui, en utilisant ESOGER, pourrait améliorer le continuum des services et soins de support du domicile des PA en attente de prise en charge. La CroixRouge québécoise a mis en place en période de pandémie des programmes d’actions communautaires de soutien aux personnes vulnérables telles que les PA10. C’est dans ce contexte qu’elle a développé au cours du premier trimestre 202 un partenariat avec le CCSMTL pour intervenir auprès des PA qui sont sur la liste d’attente du GACO. L’outil choisi pour intervenir auprès de cette population âgée est ESOGER. Ce nouveau programme communautaire (1) est une réponse au besoin de prise en charge rapide des PA fragiles présentes sur la liste d’attente du GACO du CCSMTL et (2) doit permettre le rétablissement du continuum de services et soins de support du domicile, ce qui devrait permettre de lutter contre la fragilisation de la santé et la progression de la perte d’autonomie des PA, et améliorer ainsi leur qualité de vie et réduire les coûts financiers de SSS.
Hypothèse de recherche – Nous formalisons l’hypothèse qu’ESOGER est: (1) un outil clinique permettant de débuter une prise en charge de première ligne par la CroixRouge des PA qui sont sur la liste d’attente du GACO du CCSMTL, ce qui va améliorer de leur état de santé, autonomie et qualité de vie, et réduire d’autant les consommations en services et soins de SSS ; (2) et que pour un meilleur déploiement, il est important de prendre en compte les besoins et attentes de la Croix-Rouge et du programme-services SAPA, afin d’amplifier les bénéfices, et de recevoir une plus large approbation pour une utilisation efficace, efficiente et pérenne.
Objectif global – L’objectif global du projet est d’examiner les effets de l’intervention de la Croix-Rouge utilisant ESOGER et le déploiement de cette intervention au sein de la clientèle GACO du SAPA du CCSMTL. Cet objectif répond au besoin spécifique de « l’efficience du système de soins dont les meilleures pratiques pour la prestation de soins à domicile (incluant télémédecine, santé numérique etc.) » de l’appel à projet.
Objectifs spécifiques – Le premier objectif spécifique (OS1) est quantitatif. Il est d’examiner les effets de l’intervention de la Croix-Rouge utilisant ESOGER sur l’état de santé, la perte d’autonomie, la qualité de vie des PA et la consommation de ressources en services et soins de SSS. Le second OS (OS2) est qualitatif. Il consiste à collecter et formaliser des connaissances portant sur : (a) la manière dont ESOGER sera utilisé par la Croix-Rouge et le SAPA, avec en autre la caractérisation des attentes et des besoins de ces deux acteurs, et (b) comment la Croix rouge va s’intégrer dans le continuum de services et soins de support du domicile du SAPA du CCSMTL avec en autre l’examen des obstacles et les leviers perçus à cette intégration. Le troisième et dernier OS (OS3) est d’assurer la mise en œuvre d’un déploiement réussi – c’est-à-dire recevant une forte approbation du milieu utilisateur permettant une large diffusion et une pérennité d’utilisation dans le temps – et de le documenter sous forme d’un guide de déploiement.
Méthode
Plan d’étude – Il est basé sur un devis mixte recherche-action où la progression du projet repose sur des aller-retours constants entre la Croix-Rouge, le SAPA du CCSMTL et les chercheurs.